Syndrome de l’intestin irritable ou colopathie fonctionnelle : symptômes, causes, alimentation, traitement naturel
Définition et symptômes
Définition syndrome de l’intestin irritable (ou Colopathie Fonctionnelle) – Critère de Rome IV, 2016 :
« Un patient pourrait être atteint du syndrome de l’intestin irritable s’il connaît une douleur abdominale récurrente au moins une fois par semaine en moyenne depuis les trois derniers mois, et qu’elle est associée à au moins deux de ces critères :
– la défécation
– un changement dans la fréquence des selles
– un changement dans la forme (apparence) des selles »
*Critères satisfaits pendant les trois derniers mois avec l’apparition de symptômes au moins six mois avant le diagnostic.
Les causes
Les 5 causes parmi les plus courantes du syndrome du côlon irritable ou colopathie fonctionnelle sont les suivantes. A noter qu’il existe d’autres causes.
1. Prolifération bactérienne intestinale (SIBO en anglais)
Il s’agit de la présence de bactéries dans l’intestin grêle, qui normalement se trouvent uniquement dans le colon.
Selon certaines études, 85% des personnes ayant une colopathie fonctionnelle diagnostiquée ont une prolifération bactérienne intestinale (SIBO) .
Symptômes les plus courants :
- Ballonnements moins d’une heure après les repas
- Diarrhée chronique ou constipation ou alternance constipation et diarrhée
- Rots ou reflux après les repas
- Gaz malodorants
- Gargouillements d’estomac et inconfort ou crampes d’estomac
2. Dysbiose intestinale = flore intestinale déséquilibrée
Des études récentes ont montré que jusqu’à 73% des patients ayant une colopathie fonctionnelle avaient une dysbiose intestinale .
La dysbiose c’est, en simplifiant, un déséquilibre entre:
1) Les bactéries bénéfiques (lactobacterium, propionobacterium, bifidobacterium etc.)
2) La flore opportuniste (streptocoques, entérobactéries, levures, etc.) normalement limitée et contrôlée par les bactéries bénéfiques
3) Les bactéries de transit, ingérées (alimentation, environnement), normalement contrôlées par les bactéries bénéfiques.
3. Perméabilité intestinale
Les études récentes montrent le rôle pathogène de la perméabilité intestinale dans les maladies et troubles fonctionnels de l’intestin, tels que la colopathie fonctionnelle.
Les cellules de la muqueuse de l’intestin grêle ont un rôle de barrière qui permet le passage des nutriments et le blocage des agents pathogènes, toxines et particules alimentaires non digérées.
Avec une perméabilité intestinale, agents pathogènes, toxines et particules alimentaires non digérées passent dans le sang, d’où une réponse immunitaire inflammatoire et des symptômes gastro-intestinaux.
4. Infections intestinales (de l’estomac à l’intestin)
– Bactéries pathogènes
– Champignons/Levures
– Parasites
Symptômes les plus courants :
- Diarrhée, constipation
- Gaz, ballonnements
- Reflux, brulures d’estomac, indigestion
- Echec de régimes alimentaires adaptés à une colopathie
- Symptômes secondaires tels que fatigue, déséquilibres hormonaux, prise de poids, insomnies, anxiété, etc.
5. Des intolérances alimentaires
Des recherches récentes ont suggéré que les allergies et intolérances devraient être considérées comme une cause possible de la colopathie fonctionnelle.
En cas d’intolérances alimentaires, on va souvent avoir des symptômes semblables à ceux de la colopathie fonctionnelle : gaz, ballonnements, constipation, diarrhée, douleurs abdominales
On peut avoir des allergies (réponses immunitaires IgE) ou intolérances (réponse immunitaire IgG), et aussi des carences enzymatiques (d’où maldigestion et malabsorption).
Selon ma pratique, les aliments problématiques les plus courants sont:
- les aliments contenant du gluten,
- les produits laitiers (surtout pasteurisés),
- les aliments transformés industriels
- les graisses industrielles et/ou cuites
Syndrome du côlon irritable : alimentation, régimes
Une alimentation pour aider à traiter une colopathie fonctionnelle ou syndrome de l’intestin irritable doit prendre en compte les symptômes, les causes et les tolérances individuelles, selon une approche au cas par cas. On a cependant 5 grands principes à respecter.
Principe nº1 : alimentation adaptée sur du court ou moyen terme et axée sur la guérison de l’intestin
Les régimes permettant d’aider à la guérison de l’intestin ne sont pas faits pour être suivis sur le long terme, et surement pas à vie. Ils doivent être adaptés et ciblés en fonction des causes et de vos symptômes actuels.
La plupart de mes patients qui ont un syndrome du côlon irritable doivent suivent un tel régime pendant 3 à 6 mois.
Cependant, les personnes souffrant de dysfonctionnements intestinaux plus sévères pourraient avoir besoin de suivre un régime alimentaire spécifique qui dure jusqu’à 12 mois, toujours dans le but de les faire revenir à une alimentation diversifiée, variée, riche en nutriments, avec le moins d’exclusions possible.
Principe nº2 : alimentation anti-inflammatoire.
Les problèmes intestinaux étant fortement associés à l’inflammation, nous allons chercher à inclure des aliments anti-inflammatoires tels que les aliments riches en acides gras oméga-3 présents dans les poissons gras et les noix, ainsi que des antioxydants et des minéraux présents dans les fruits de couleur foncée et les légumes verts. Inclure des épices anti-inflammatoires comme le curcuma et le gingembre est également important.
Principe nº3 : alimentation qui n’exacerbe pas les symptômes.
Il y a beaucoup d’aliments qui causent des symptômes. Il s’agit surtout des produits transformés industriels, les céréales contenant du gluten, les produits laitiers pasteurisés (et parfois au lait cru aussi), les fruits oléagineux et les légumineuses (parfois ok en petite quantité). Cela signifie que votre régime doit être adapté à vos symptômes et aux aliments qui conviennent le mieux à votre corps.
Principe nº4 : alimentation qui affame les micro-organismes indésirables.
Si les analyses et tests identifient une prolifération bactérienne ou une infection intestinale comme cause première de votre colopathie fonctionnelle, vous devez respecter certaines exigences diététiques spécifiques pour aider à affamer ces agents pathogènes. La plupart de ces pathogènes se nourrissent principalement de glucides; votre régime de guérison va donc présenter une certaine restriction au niveau des glucides.
Principe nº5 : alimentation suffisamment variée et nutritive
Cela permettra d’éviter que vous ayez des carences nutritionnelles et encouragera la diversité du microbiome (la flore intestinale). C’est très important.
Il faut s’assurer que les aliments que vous consommez sont suffisamment variés, en particulier qu’ils incluent des sources de glucides telles que les fruits et les légumes, de manière à ce que votre corps reçoive toutes les vitamines, minéraux, protéines, graisses et glucides dont il a besoin.
La diversité et la variété des aliments va également favoriser une plus grande diversité des bactéries bénéfiques de votre intestin, ce qui est capital pour la guérison.
Les régimes les plus courants pour le syndrome du côlon irritable
Il existe différents régimes qui fonctionnent plutôt bien dans les cas de syndrome du côlon irritable. Ils ont été développés par des médecins ou autres professionnels du domaine de la santé.
Il est très important de bien comprendre que le régime qui va vous aider sera sûrement un peu différent de celui qui va aider une autre personne, même si la maladie est la même. Le régime doit donc toujours être adapté au cas par cas.
Prenons un exemple : Madame A. a un syndrome du côlon irritable récemment diagnostiqué et elle s’est aperçue qu’elle a une forte intolérante au lactose : elle va donc devoir éviter tous les produits laitiers, ainsi que le beurre et la crème. Elle devra veiller à un apport de calcium de source végétal correspondant à ses besoins bien que certains légumes devront être évités car non tolérés.
Madame B. a aussi un syndrome du côlon irritable récemment diagnostiqué, et elle ne mange pas de viande ni de volaille : elle va donc avoir un apport de protéines par un peu de légumineuses si elle les tolère, des œufs et des produits laitiers mais uniquement ceux qu’elle tolère. Les régimes vont donc reposer sur les mêmes principes, mais seront au final assez différents.
Les régimes du syndrome du côlon irritable visent tous à limiter les aliments transformés industriels et certains glucides. Pourquoi ? Parce que les glucides sont ce qui nourrit les infections et les bactéries en cas de prolifération bactérienne et les micro-organismes pathogènes de manière générale.
Malheureusement, de nombreux glucides sont présents dans des aliments sains comme les fruits et les légumes. C’est pourquoi il est préférable de n’utiliser ces régimes que pendant une courte période pendant que l’on traite par des traitements conventionnels et/ou naturels les causes du syndrome du côlon irritable.
Éléments communs aux différents régimes
- Limitation des glucides
- Viande, volaille, poisson – non transformés
- Graisses animales, huiles d’olive ou de coco, huiles végétales pressées à froid
- Maintien des fruits et légumes dans l’alimentation autant que possible
- Régime à tenir sur des durées les plus courtes possibles
A noter qu’il est préférable d’éviter les régimes trop restreints en glucides ou même totalement dépourvus de glucides. Chez des personnes ayant des troubles intestinaux, ces régimes peuvent entraîner des problèmes d’hormones et/ou de thyroïde. On aura alors des symptômes comme de la fatigue, une prise de poids, des problèmes de peau cheveux ongles, etc.
1. Le régime RGS (Régime Glucides Spécifiques)
Ce régime est au départ le SCD = Specific Carbohydrate Diet. Il a été créé dans les années 1950 et aménagé par Elaine Gottschall.
Il peut être utilisé pour le syndrome de l’intestin irritable, en général quand on a une prolifération bactérienne modérée.
Il peut être utilisé selon le cas pour la rectocolite hémorragique ou colite ulcéreuse, et pour la maladie de Crohn. Il peut être intéressant pour la maladie cœliaque, du moins au départ (l’éviction du gluten est indispensable mais bien souvent insuffisante pour venir à bout des symptômes de cette maladie,)
Le principe du régime RGS repose sur l’exclusion des céréales, des sucres, des amidons et de tous les aliments transformés industriels, qui nourrissent les micro-organismes pathogènes et contribuent à l’inflammation de la paroi intestinale.
C’est le régime que j’utilise le plus souvent pour les troubles digestifs, sur des durées courtes en début d’accompagnement.
Il permet souvent d’obtenir rapidement de bons résultats et une amélioration des symptômes. On l’adapte ensuite petit à petit, avec l’objectif de revenir à une alimentation variée et quasiment sans exclusions (sauf en cas d’intolérances alimentaires bien sûr).
Aliments inclus
- Viande, volaille, poisson, œufs – non transformés
- La plupart des fruits et des légumes sauf ceux riches en amidon
- Fruits oléagineux (noix, amandes, etc.)
- Certains produits laitiers
- Certaines légumineuses
- Herbes, épices
- Graisses animales, huile d’olive, huile de coco
- Miel
Aliments exclus
- Tous les aliments transformés industriels
- Toutes les céréales
- Les viandes transformés (charcuterie, saucisses, etc.)
- Fruits et légumes en conserve
- Légumes riches en amidon
- La plupart des produits laitiers
- La plupart des légumineuses
- Tous les sucres sauf le miel
2. Le régime pauvre en FODMAP (Fermentescibles Oligosaccharides Disaccharides Monosaccharides And Polyols)
Le régime pauvre en FODMAP a été développé par des chercheurs de l’Université Monash en Australie. Le principe de ce régime est la limitation de certains sucres (glucides à chaîne courte), appelés FODMAPS – Oligosaccharides, disaccharides, monosaccharides et polyols fermentescibles. Ces sucres peuvent être mal absorbés dans l’intestin grêle et fermentés par des bactéries, ce qui entraine une production de gaz et des ballonnements.
Un régime pauvre en FODMAP est adapté au syndrome du côlon irritable dans la mesure où il est idéal pour corriger une dysbiose ou une prolifération bactérienne modérée (pour ceux qui tolèrent les céréales, l’amidon, les fibres et le saccharose). Il peut être bien aussi comme régime transitoire après des régimes plus restrictifs une fois que les tolérances alimentaires ont augmenté.
Les aliments à éviter avec un régime pauvre en FODMAP sont les fruits à haute teneur en fructose, le miel et les sucres contenant du fructose, le lactose présent dans les produits laitiers, les polyols comme le mannitol et le sorbitol présents dans certains fruits, légumes et édulcorants, les fructanes contenus dans les céréales à gluten, les galacto-oligosaccharides (GOS) présents dans certaines légumineuses et certains légumes comme l’oignon et l’ail.
Parce que ce régime est centré sur certains glucides contenus dans les aliments plutôt que sur des groupes d’aliments entiers, il peut être difficile de s’y retrouver. A la complexité s’ajoute le fait que de nombreuses restrictions sont basées sur la quantité d’aliment consommée, plutôt que sur un simple « feu vert » ou « feu rouge » pour un aliment. Une liste d’aliments autorisés est généralement nécessaire.
Les aliments inclus dans le régime sont les viandes, volailles, poissons et œufs non transformés, les graisses animales et huiles végétales pressées à froid, certains fruits, certains légumes, certaines céréales, certains fruits oléagineux, certaines légumineuses, les produits laitiers à faible teneur en lactose, et les herbes et épices naturelles.
3. Le régime entéropsychologique ou GAPS
Le régime GAPS (Gut and Psychology Syndrome) a été mis au point par la Dr Natasha Campbell-McBride et repose en grande partie sur le régime RGS, avec quelques modifications, pour les personnes souffrant de problèmes intestinaux et neurologiques.
Il peut être utilisé pour des personnes qui ont des problèmes intestinaux qui coexistent avec des troubles de l’humeur et/ou des troubles neurologiques tels que l’autisme, le TDAH, la dépression, l’anxiété, la schizophrénie.
Les types d’aliments à éviter avec ce régime sont similaires à ceux du RGS, à savoir les aliments transformés industriels y compris les viandes transformées et les produits laitiers, les céréales, les légumes riches en amidon, les sucres et tous les aliments contenant des sucres, la plupart des légumineuses, le lactose et l’alcool.
Les types d’aliments inclus dans le régime sont les viandes, volailles, poissons et œufs non transformés, la plupart des fruits et légumes non riches en amidon, les fruits oléagineux, quelques légumineuses, toutes les herbes et épices naturelles, le miel, les graisses animales et l’huile d’olive. Les boissons peuvent inclure de l’eau, des jus de fruits fraîchement pressés, des bouillons de viande, du thé et du café légers.
Adapter le régime aux intolérances et allergies alimentaires
Les sensibilités alimentaires peuvent être une cause ou un déclencheur des symptômes de la colopathie fonctionnelle, et elles doivent donc être prises en compte dans le régime choisi.
Un exemple de cela pourrait être une personne qui a une prolifération bactérienne modérée et suit un régime pauvre en FODMAP, mais son test d’intolérances alimentaires identifie une réaction aux protéines des œufs, de l’ananas et des amandes. Ces trois aliments devraient donc être évités pendant 3 à 6 mois environ, en fonction du niveau de réaction identifié lors du test.
Syndrome de l’intestin irritable : traitement naturel
Pour mettre toutes les chances de son coté, il est important de prendre en compte le style de vie et de faire certains changements pour bénéficier comme par exemple d’un temps de sommeil réparateur suffisant, d’une activité physique adaptée, et d’une réduction du stress.
Optimiser le sommeil : le sommeil vraiment régénérateur et qui permet la réparation des tissus a lieu entre 22h et 2h du matin. Idéalement, on essaiera de dormir entre 7h et 9h par nuit en moyenne.
Activité physique adaptée : recommandé uniquement si ce n’est pas un stress additionnel, il s’agira de privilégier une activité modérée de type marche, yoga, pilates, etc, à voir avec un professionnel.
Stratégies de réduction des stress : stress physique (douleurs, blessures, etc.), stress mental et/ou émotionnel, stress biochimique (causes du SCI, intolérances alimentaires). Pour les 2 premiers, on pourra faire appel à des professionnels de santé spécialisés. Pour le stress biochimique, on aura le traitement médical et l’accompagnement nutritionnel.
Compléments alimentaires naturels
Il est très difficile voire impossible d’absorber tous les nutriments nécessaires en quantités suffisantes grâce à l’alimentation seule lorsque la bonne santé de notre système digestif est compromise. En effet, les infections intestinales, la prolifération bactérienne, la dysbiose, la perméabilité intestinale et les intolérances alimentaires affectent notre capacité à synthétiser et à absorber ce dont nous avons besoin dans les aliments que nous mangeons.
Heureusement, les compléments alimentaires naturels peuvent fournir le lien manquant entre ce qui est nécessaire pour atteindre une santé optimale et ce que nous sommes en mesure d’absorber.
Les compléments ne devraient jamais être la première étape, raison pour laquelle je les aborde en dernier, mais ils peuvent représenter selon les personnes une partie importante du traitement naturel du syndrome du côlon irritable.
Voici les trois fonctions principales des compléments alimentaires et pourquoi il peut être intéressant de les utiliser dans le cadre du syndrome de l’intestin irritable :
> Fonction de remplacement : un complément bien choisi va par exemple remplacer des substances comme l’acide chlorhydrique ou certaines enzymes digestives, que le corps ne produit plus du fait de troubles intestinaux chroniques.
> Fonction de stimulation : les vitamines naturelles et les minéraux vont par exemple stimuler les organes ou les glandes et les aider à mieux fonctionner.
> Fonction de soutien : les compléments bien ciblés vont être une aide à court terme pour le corps pendant le rétablissement de ses fonctions diverses liées à la digestion. Par exemple, certains compléments pourront aider le foie ou les glandes surrénales à mieux éliminer les toxines et mieux réagir aux différents stress.
Pour aider la digestion, nous allons avoir recours parfois à des enzymes digestives. Pour aider la nutrition, ce sera plutôt des vitamines, minéraux, graisses, et acides aminés. L’aide à la détoxification se fera grâce à des vitamines, des minéraux, des plantes.
Pour aider le système immunitaire, il est utile de renforcer les apports en antioxydants, et l’on pourra aussi utiliser des plantes, des champignons médicinaux, avec l’aide d’un professionnel de santé spécialisé.